haque vin est fils de la terre et de l’air et enfant de l’homme. C’est en effet ce dernier qui, par ses soins inlassables, précis et affectifs, portera le vin à la ressemblance du lieu, en lui permettant ainsi d’être nommé.

À cet endroit vit le cep fier et noué par la marche du temps : chaque année, il repart pour un parcours avec ses 5 ou 6 yeux qui, de l’équinoxe du printemps, scrutent l’air se méfiant d’une fraîcheur excessive qui gèlerait leur regard. Pendant ce temps, les racines vont explorer le sol pour y cueillir leur nourriture. L’ensemble de ces éléments captés se retrouvera dans le verre de vin. Mais aussi :

• Le soleil avec ombre et lumière, la pluie qui n’est pas souhaitée au moment de la fleur de la vigne, de sa fécondation amoureuse et lors de la période où le fruit mûri.
• Le vent qui sèche, nettoie, caresse, permettant parfois à l’humide du sol de rejaillir et de déposer ses perles de rose sur les grappes ambrées. Chaque année, le ballet de l’air est différent apportant au vin une silhouette nouvelle qui s’ajoute au registre précédent de l’expression des vins. Ainsi, l’air chasse la monotonie.
• Le sol, lui, est permanent ; il est le gardien du style. Ce style qui, au moindre changement plastique, plus ou moins siliceux, plus ou moins argileux, plus ou moins calcaire… deviendra forme aux contours précis.

Au travers du vin, nous pouvons alors apprécier ces frontières du naturel qui enferment une vie biologique dont l’authenticité devient source émotionnelle. Le vin de Meursault illustre d’une façon claire cette situation en nous proposant une mosaïque de vins frappés par le milieu sous la conduite de l’homme, véritable artiste, qu’est le vigneron.

L’ouvrage de Henri CANNARD va nous permettre de mieux pénétrer dans cette intimité du vin de Meursault. Il décrit, parcelle après parcelle, l’environnement du cep, nous aidant à comprendre dans quel décor le vin prend naissance. Ceci nous donne alors envie de goûter le vin, d’écouter son discours, de profiter de son intimité. Ce livre, conçu dans l’esprit d’une monographie, nous laisse percevoir la ténacité humaine nécessaire afin que le vin devienne écho du lieu. Au travers de descriptions précises sur la vie sociale des vignerons, leurs fêtes, leurs rencontres, ce livre nous fait entrer dans cette communauté vigneronne qui est gardienne de l’expression Meursault au travers de ses vins. Cette réalité a demandé des siècles et des siècles et cela continuera, car le vigneron a besoin de rendre toujours plus beau, plus juste, le vin qu’il nous offre.